Atterrir à New Delhi
20 septembre 2014, 5 ans après mon départ de l’Inde, j’atterrie de nouveau à Delhi. Cette fois pour de simples vacances, accompagnée de ma soeur, son copain et le mien. Pour les deux premiers il s’agit d’une découverte de l’Inde. Pour Romain et moi, il s’agit donc plutôt d’une redécouverte de l’Inde du point de vue du touriste de passage.
Les sensations à l’atterrissage sont toujours les mêmes. L’odeur de canicule, mélange de safran, de caoutchouc fondu et d’autres éléments olfactifs Delhiites est toujours là pour mon plus grand plaisir.
Seul l’aéroport s’est métamorphosé, son terminal 3 ultra-moderne et calme, accueillant les vols internationaux, a pris vie. Son opulence est telle qu’elle dénote trop avec la réalité du pays dont sont issues ses fondations.
La clim, convenablement réglée, fait occulter aux voyageurs qu’ils viennent de débarquer en Inde, que la mousson n’est pas si loin, que son important taux d’humidité a persisté et cohabite désormais avec une température qui serait jugée caniculaire en France, frollant les 40°.
Notre transit par Bombay, où débarqués à 9h du matin nous avions spontanément transpirés toute l’eau de notre corps, nous en avait pourtant donné un premier aperçu.
La sortie de l’aéroport est désormais beaucoup moins folle, bien plus conventionnelle. Les chauffeurs de taxi ne sautent plus sur les touristes fraîchement débarqués. Les voitures ne se font plus de queue de poisson pour gagner le droit de sortir du parking chaotique. Et pour cause, pour rejoindre la ville un métro hyper moderne, spacieux et confortable a fait son apparition.
Nous choisissons néanmoins de prendre un taxi pré-paid à la sortie de l’aéroport qui, pour 152 INR par personne, nous emmènera vers Old Delhi à travers un voyage dans mes souvenirs via les différents quartiers de la mégalopole.
Green Parc, Janpat, India Gate, Président Estate… ces quartiers verdoyants surprennent mes compagnons de voyages qui ne s’attendaient pas à tant de végétations et à des routes impeccables.
Malheureusement nous n’y avons pas croisé d’éléphants comme il peut parfois s’en promener guidé par leur cornac. Déjà rares il y a 5 ans, y en a-t-il seulement encore sur le bitume de Delhi?
Puis nous empruntons la rocade direction Old Delhi et New Delhi, son monde idéal fait de quartiers chics et calme laisse place à la réalité du quotidien de nombreux indien. A l’arrivée dans le vieux Delhi nous sommes pris dans les embouteillages de véhicules en tout genre, motorisés ou non.
Les véhicules sont d’une telle diversité qu’un code de la route est inapplicable et la moindre vache traversant la rue hébétée créé un goulot d’étranglement pouvant mettre des heures à s’élargir.
A moins d’organiser les routes avec des files spécifiques à chaque type de véhicule, les voitures, motos et auto-rickshaw d’un côté, les rickshaws et autres charrettes d’un autre, et d’apprendre aux vaches à traverser au passage piéton, je n’imagine pas que ce problème puisse être réglé dans un futur proche.
Les klaxons vont bon train mais ils sont plutôt utilisés pour prévenir de son passage que pour exprimer son mécontentement. L’indifférence règne. Les gens s’entre-aident parfois, poussant les roues des rickshaw prises dans des nids de poules, aidant les camionnettes à manœuvrer.
Et pour passer le temps, ils observent les quatre jeunes français dégoulinants pris au piège dans leur boite en métal.
Old Delhi,
Il fait une chaleur incroyable, nous sommes trempés par notre sueur dans ce taxi, mini bus roulant au gaz naturel.
Le chauffeur ne nous descendra pas à notre hotel. Les embouteillages nous feraient perdre trop de temps.
Nous voilà donc lachés au beau milieu d’un carrefour. Retenant notre souffle avant de plonger dans la vague de véhicules s’avançant et nous bloquant le passage vers une rue qu’on imagine mener vers notre hôtel.
Nous n’avions bien sur pas de plan du quartier, (en existe-t-il seulement ?), et suivons l’intuition de Romain.
Les trottoirs, où ce qui s’y apparente, sont tout aussi embouteillés que les routes qu’ils bordent. Se frayer un passage au milieu de la foule avec nos imposants bagages sur le dos est le premier défi indien que relèvent mes compagnons de voyage non habitués à être dévisagés tel un sikh qui ferait du tourisme à Maubeuge.
Même si nous ne sommes pas sur de nous, de notre route, nous tenons tête à nos doutes et avançons avec conviction vers Fathepuri, la rue de notre hôtel.
A l’aide des indications de quelques commerçants, innombrables dans ce quartier, nous finissons par tomber sur le Vaishnaw Hotel, notre QG pour les deux premiers jours que nous allions passer à Delhi.
Massé entre un chips-walla (je doute de l’existence de cette dénomination mais voilà comment j’appellerai quelqu’un qui fabrique et vend des petits biscuits apéro dans une petite échoppe) et un lassi-walla notre hôtel est en plein coeur de la vie grouillante de ce quartier historique, ancienne capitale de l’empire Moghol (et non Mongole) fondée par Shajahan au 17e siecle.
Fatigués par le voyage, mais bouillants d’impatience de découvrir ou redécouvrir l’ambiance indienne, nous n’avons pas paressé à l’hôtel très longtemps. Nous ne nous sommes laissés que le temps d’un tchaï (thè aux épices, lait et sucre) dans l’ambiance confinée et rassurante de notre chambre pour nous préparer à aller goûter au tchaï qu’est Delhi, excitant, parfois un peu épicé de part ses images qui nous interpellent, mais souvent doux par la gentillesse de beaucoup.
Direction Chandni Chowk, littéralement le “marché éclairé par la lune”, qui semble tenir son nom du fait qu’il était initialement un parc bordé de canaux dont la fonction était de refléter le clair de lune et donc de faire scintiller Lal Quila, le fort rouge, durant la nuit.
Lal Quila
Aujourd’hui, la pollution à Delhi semble trop épaisse pour que la lune puisse continuer à éclairer les marchands noctambules mais l’électricité l’a remplacée.
Tout aussi capricieuse que la lune qui se cacherait derrière les nuages, l’électricité fait parfois des siennes même si les coupures m’ont semblé plus occasionnelles que lorsque je vivais à Sarita Vihar.
Elles n’ont pas empêcher le quartier de vivres ces nuits blanches, non faites de soirées festives arrosées mais de labeur. Car quand les chalands, nombreux en cette période pré-diwali, quittent les artères encombrées du quartier, ce n’est que pour laisser la place aux livreurs en tous genres.
Un samedi ordinaire à Chandni Chowk
Rentrés après la tombée de la nuit à notre hôtel nous découvrons un flux constant de livreur acheminant des colis par tous les moyens possibles, sur leur tête, dans leur camionnette, en rickshaw ou à la force de leur bras. Ces va-et-vient se prolongent tard dans la nuit, à 2h du matin les klaxons nous empêchent de dormir et donnent l’impression que jamais ils ne cessent dans ce quartier.
Le calme fini par s’imposer dans ce concert dissonant, mais le temps d’une courte entre-acte seulement, avant que les chiens errants finissent par comprendre qu’il est temps pour eux d’entrer en scène.
Se délecter à Old Delhi
Mais Chandni Chow et le Old Delhi ne se résument pas à des lieux un peu hostiles pour un français en vadrouille, il regorge de petits restaurants dans lesquels il ne fait pas hésiter à aller manger un bout sous peine de passer à côté de la vrai cuisine nord indienne.
Sur les conseils de Anurag, un indien (adorable) vivant à Lyon et travaillant avec Romain, nous avons entamé un jeu de piste dès notre premier jour dans le old Delhi pour tenter de tomber sur les meilleurs restaurants, selon lui. Avoir l’adresse d’un restaurant ne suffit pas à le trouver. Perpendiculairement, ou presque, à Chandni Chowk, se forme un dense maillage de très étroites ruelles. Sombres, à l’atmosphère suffocante, enfumées par les restaurants qui s’y entassent, elles sont pourtant tout autant saturées que la grande avenue qu’est Chandni chowk.
Les piétons se fraient un accès à travers ce dédale, faisant fi des motos imposant leur passage.
Attentifs à ne pas manquer la ruelle qui nous mènera vers notre premier objectif, nous finissons par atteindre notre Parawthe-walla dont les cinq générations en font l’un des meilleurs du Old Delhi. Un “parawthe-walla” est une personne qui fait des “parawthe”. Et un “parawathe” est une sorte de galette fourée avec à peu près tout que qu’on peu imaginer.
Les parawathe (“parantas”, si tant est qu’on puisse franciser ce mot) sont souvent servis accompagnés d’un tali, une assiette compartimentée , remplie de divers légumes en sauces épicées et de curd (yahourt). Un délice pour qui sait apprécier épices et piments.
Après ce restaurant, succulent mais bien trop épicé pour 4 français tout juste débarqués, nous avons profité de notre retour à l’hôtel pour y commander une assiette de plain rice et avons tous siroté un petit smecta juste au cas où…
Le lendemain nos défis culinaires nous ont emmené chez Karim, restaurant fondé il y a un siècle par le fils d’un cuisinier de l’empereur moghol.
Le cuisto aurait alors affirmé “Je veux gagner en renommé et en richesse en servant de la nourriture royalle aux hommes ordinaires” . Il aura effectivement gagné en renommé puisque nombre de guides touristiques conseillent ce restaurant qui s’est depuis quelques années transformé en une chaîne sur Delhi et sa banlieue.
C’était là l’occasion d’une retrouvaille avec mes collègues, Ankur et Gaurav, que je n’avais pas vu depuis 5 ans. Bien que végétariens ils sont acceptés de nous accompagner dans ce restaurants dont les spécialités les plus réputées sont cuisinées à base de viande. Butter-naans à l’allure de brioche, kababs fondants et paneer matar ont satisfait nos appétits intrépides.
Le dessert fût pris le soir en rentrant de notre balade reposante à Lodhi Garden, un délicieux “Kesar lassi” (sorte de yahourt à boire au safran) siroté face à l’échoppe d’un Amritsari lassi walla, un vendeur de lassi originaire d’Amritsar.
Nous sommes épuisés. Nous nous sentons poisseux. Nous rentrons alors au Vaishnaw Hotel, pensant pouvoir dormir un peu avant de se lever à 2h du matin pour prendre l’avion pour Leh. Cependant, même posés devant une série des plus soporifique « Super Cops vs Super Vilain », nous ne parviendrons à trouver le sommeil dans ce vacarme sans clair de lune.
Liens et « bons » plans :
– un superbe blog qui porte bien son nom ‘Eat and dust” et qui parle presque exclusivement des restaurants du old delhi. : http://eatanddust.com/
– un hotel : notre hotel le Vaishnaw Hotel, hôtes très accueillant, super clean mais, détail important, il faut demander une chambre qui ne donne pas sur la rue si vous imaginez y dormir
– Boire un lassi : Amritsari Lassi Walla. Adresse : quelque part entre chandni chowk et fatehpur
– Karim’s restaurant : quelque part près de la Jama Majid
ps : désolée pour les lecteurs (si toutefois il y en a), mes articles sont écrits de façon totalement anachroniques, j’espère que ce n’est pas trop perturbant.