Juillet 2012. Après deux semaines passées à découvrir le Mustang à pied, nous profitions de nos derniers jours au Népal pour découvrir, loin des montagnes, la plaine sud appelée Terail sur laquelle s’étend un parc national : Le chitwan.
Le treck terminé, nous nous sommes rendus à Pokhara où nous avions laissé quelques affaires à l’hôtel. Nous devions y passer la journée et avoir le temps de faire quelques balades autour du lac, mais n’ayant pas eu d’avion pour rentrer de Jomoson , le point de départ et d’arrivé du treck, nous avons dû subir 10 heures de nids de poules dans des bus locaux ce qui ne nous a laissé le temps que pour une bonne douche avant de filer au resto.
Après une nuit peu reposante en raison de la chaleur humide de mousson et du boucan des frigo de l’entreprot de fromage de yack attenant, nous sommes partis en voiture à 8h de Pokhara pour arriver vers 13h au Chitwan. Sur ce long trajet qui nous éloigna des montagnes, nous avons craint d’être bloqués dans des embouteillages monstres causés par des blocages routiers menés par les Maoïstes. Mais un seul panneau « tourists » griffonné à la main leva les barrages.
Ce parc est situé dans la partie sud du Népal, à basse altitude, dénommée le “Terail”. « Chitwan » signifie en dialecte local « dense forêt ».
Je m’attendais à un séjour hyper organisé, style club de vacances familiales, dans un zoo grandeur nature notamment en raison du fait que le programme proposé par l’hôtel était chronométré heure par heure. Mais moi qui ne suis pas trop branchée « voyages organisés » je n’ai pas été au bout de mes surprises durant les 2 jours et demi passés là bas.
Premier point remarquable : très peu de touristes en cette saison.
La mousson arrivant sur le Népal entre juin et septembre il y fait très chaud, très humide et forcement il pleut des cordes, cela n’attire pas vraiment les touristes peu désireux de se faire dévorer par les moustiques.
Je peine à imaginer ce que peut être ce parc en plein saison, en effet le village de Sauraha dans lequel j’ai séjourné est bondé d’hôtels et de guesthouses (la mienne était “The Rhino Residency Resort” et était complétement vide durant les deux nuits passées). L’une de ses rues m’a d’ailleurs fait pensé à Phokara avec toutes ses boutiques souvenir.
Les Tharus
En raison de la chaleur les activités proposées par l’hôtel n’ont débuté qu’à partir de 16h par une balade en calèche tirée par deux taureaux.
Transport en commun Tharu
Celle-ci avait pour objectif de nous emmener dans un musée présentant les coutumes locales tout en traversant les villages traditionnels Tharu, plus ancienne population de cette région, seule ethnie qui résistait à la Malaria jusqu’à son éradication complète du parc dans les années soixante (pas besoin de Malarone donc pour un séjour là base, je revends d’ailleurs deux semaines de traitement si ça intéresse quelqu’un).
Moi qui m’attendait à un séjour sous le signe de la faune et de la flore j’ai été très agréablement surprise par cet aspect culturel qui nous était proposé à la découverte des modes de vie locaux mais ne transformant pas pour autant les villages en de véritable zoo humain.
A travers cette balade, nous avons pu observer le travail des paysans dans des rizières dont les coloris éclatants des vêtements s’accordaient somptueusement avec le vert des pousses de riz, contrastant avec la couleur grise impénétrable du ciel d’orage de mousson.
Avec l’arrivée de la mousson le travail des rizières débute
Aux abords des champs étaient disposées les maisons traditionnelles aux murs de treillis de branche et terre séchée.
Nous avons ensuite fait nos premiers pas dans la jungle aux alentours des villages. Là nous avons eu la chance de croiser notre premier rhinocéros, en totale liberté bien sûr.
Pradip, le responsable de notre agence, qui avait pris quelques jours pour passer un peu de temps avec nous, m’avait indiqué qu’il était possible que nous ne croisions aucun animal durant notre séjour. Celui-ci commençait donc sous de bons auspices.
« Colonel Athi » : il en faut peu pour être heureux…
Pour terminer la journée nous sommes partis en jeep au centre culturel Tharu, où étaient réunis les quelques dizaines de touristes présentes sur le parc pour un spectacle de danses traditionnelles.
Perdus dans la jungle – la redécouverte des Tharus
Le second jour nous nous sommes levés tôt pour une balade en canoé sur la rivière traversant la jungle. Les canoé utilisés sont creusés dans un “silk cotton tree” et poussés par une perche.
Canoe des pêcheurs tharus
Cela nous a permis d’observer dans un calme appréciable des marabous et autres oiseaux, quelques crocodiles (des garhial notamment) dont on apercevait les museaux, seule partie de leur corps sortant de l’eau par cette chaleur.
Au grès des flots nous sommes de nouveau tombés sur un rhino prenant son bain… Moment magique que de découvrir cet animal à l’allure préhistorique errer là paisiblement, faisant peu de fait de notre passage.
Rhinoceros du Népal
Pour la suite de la matinée il était prévu que nous marchions environ une heure dans la jungle avant d’assister au bain des éléphants domestiques (prévu pour que les touristes finissent trempés avec de superbes photos pour leur album) et de finir au “breading center” s’attendrir auprès éléphanteaux tenant à peine debout.
Cependant, la réalité de la jungle nous a vite rattrapé et a chamboulé les projets du guide de l’hotel qui nous accompagnait.
La balade avait bien commencé, nous avons pu observer des troupeaux de dains, biches, un cerf, des traces de rhinocéros, d’ours près de termitières mais c’est quand nous avons aperçus les premières traces de tigre que les choses ont commencé à se gâter. Le guide voulant nous impressionner s’est mis à les suivre dans l’espoir de tomber sur le roi de la jungle qui les avait déposé là. Sauf qu’à force de les suivre celui-ci a perdu ses repères.
Sur les traces du tigre du Bengale
A 10h30 alors que nous devions être au bain des éléphants nous étions au milieu d’herbes plus hautes que nous, sous le soleil, sans eau ou crème solaire (nécessaire de survie dans cet environnement).
Nous sentions le guide tout décontenancé s’asseyant toutes les 2 minutes, suant à grosses goûtes, et commencions à douter des décisions qu’il prenait… d’autant qu’en bon Népalais ne disant jamais « non », il ne nous a jamais dit clairement qu’il été perdu.
Lost : le remake
Il a tenté de nous rapprocher de la rivière et d’appeler un canoéiste à la rescousse mais il n’y avait pas grand monde à l’horizon.
Lorsque, enfin, nous sommes tombés sur un jeune pêcheur aux filets de jute celui-ci ne semblait pas enclin à nous faire monter à bord et préféra continuer sa baignade.
Nous comprimes sa décision bien plus tard quand nous avons réalisé à quel point nous nous étions éloignés de notre village.
Notre guide s’étant lui octroyé une pause baignade pour reprendre ses esprits nous n’avons eu d’autres solutions que de reprendre notre marche vers nulle part.
La mousson a alors décidé de venir pimenter notre tentative de retrouver notre chemin.
Complètement trempés en quelques minutes nous avons dû traverser plusieurs ruisseaux boueux à pied, pantalons remontés. La pression est quelque peu montée lorsque nous avons dû jouer aux équilibristes sur un tronc rendu glissant par la pluie, déposé entre les deux rives d’un ruisseau à plusieurs mètres du sol. Les jambes tremblantes, j’ai du vaincre mon vertige avant de continuer à marcher un long moments dans mes Pataugas transformées en Pataugeoire, blasés par les trombes d’eau nous tombant dessus et rendant le sol complètement boueux.
L’aventure a touché à sa fin lorsque nous avons aperçu le toit d’une maison. Après avoir escaladé la clôture de barbelés protégeant les habitants des animaux sauvages, nous avons eu le bonheur de découvrir un mignon village Tharu, vierge de tout béton et plein d’enfants souriants respirant la simplicité.
Fillettes tharus
Là nous avons attendu plusieurs dizaines de minutes la jeep de “l’équipe de secours” de l’hotel.
Nous avons mis une bonne demi-heure pour rentrer à l’hôtel ce qui nous a fait réaliser à quel point nous avions dû nous éloigner. Durant le trajet de retour lors duquel nous avons traversés de nombreux villages, assis à l’arrière de notre pickup surplombant la route, nous avions l’impression d’incarner la reine d’Angleterre en plein jubilé. Nous ne croisions pas un enfant sans que celui-ci nous fasse de grands signes auquel nous répondions d’un coucou de la main.
Et comme si le ciel voulait tester le flegme bhoutiste acquis suite à notre plongée dans la culture Tibétaine, alors que nous roulions dans la jeep décapotée la mousson nous est de nouveau tombée dessus. Comme on nous avait demandé de nous vêtir de couleurs neutre je n’avais pas ma goretex Patagonia fushia (couleur vive pratique en montagne pour être repérée) sur moi, nous sommes donc arrivés dégoulinants, la peau fripée comme à la sortie d’un bain, mais morts de rire à l’hôtel pour courir prendre une douche, chaude cette fois.
Moi qu’on surnommait Mowgli étant petite je n’ai pas été déçu de ma première aventure dans la jungle sub-continentale.
Nous avons appris le lendemain, qu’à 10h30 le patron de l’hôtel, se trouvant pourtant à Katmandou, était déjà au courant que nous étions perdus. Bref notre mésaventure à très très vite fait le tour des employés, nous espérons seulement que notre « guide » n’a pas été sanctionné par sa direction, en tous cas nous sommes très loin d’avoir crié au scandale.
Le lendemain, l’événement marquant a été le safari à dos d’éléphant dans la jungle. Balade agréable malgré le mal des transport qui m’a pris dès les premiers pas de l’éléphant bien que celle-ci ne nous ait pas permis de rencontrer le fameux tigre.